Par Karim B. – Le président français aurait sans doute mieux fait de s’abstenir. A l’occasion de la commémoration du déclenchement de la glorieuse Révolution armée du 1er Novembre 1954, Emmanuel Macron a adressé un message de vœux au président Tebboune. Quelques lignes seulement, d’une banalité confondante : «A l’occasion de la commémoration de l’anniversaire du 1er Novembre, je tiens à vous adresser, ainsi qu’au peuple algérien, mes chaleureuses félicitations et mes vœux les meilleurs.»
Rien de plus. Ni un mot sur l’histoire commune, ni une pensée pour les sacrifices de la guerre de Libération nationale, ni même une allusion au travail de mémoire qu’il avait lui-même entrepris. Ce message, le plus court et le plus fade jamais envoyé depuis 1962, résonne comme un geste mécanique, dépourvu de la moindre portée politique.
Pour la presse française, cette formule polie serait pourtant un «signe d’apaisement» et un «premier pas vers la réconciliation» entre Paris et Alger. Mais à y regarder de plus près, cette lecture optimiste relève davantage du souhait que de l’analyse. Car ce message, loin d’ouvrir une nouvelle page, témoigne surtout du désarroi d’un président en quête d’oxygène diplomatique.
Embourbé dans une crise intérieure sans précédent – économique, sociale, institutionnelle et même morale – Emmanuel Macron tente d’exister sur la scène internationale, à défaut de convaincre dans son propre pays. L’Elysée, cerné par les contestations et les fractures politiques, cherche dans chaque dossier étranger un prétexte pour détourner l’attention. Le message adressé au président Tebboune n’échappe pas à cette logique de communication.
D’autant que le contexte sécuritaire entre les deux pays est tendu. La rupture de la coopération par les services algériens, confirmée par le nouveau ministre de l’Intérieur et la directrice de la DGSI, inquiète sérieusement Paris. Le président français sait, au vu des rapports alarmants qui lui parviennent, que cette suspension fragilise la lutte contre les menaces transnationales. D’où cette tentative de renouer un contact, fût-il symbolique, dans l’espoir de calmer les inquiétudes. Mais un simple message de vœux ne saurait combler le fossé creusé par des années de provocations et de déclarations condescendantes.
Macron, qui aimait se présenter comme le président du «parler vrai», signe ici un texte de pure convenance. Une communication sans âme, sans profondeur, sans vision. Là où il aurait pu rappeler les liens humains, historiques et culturels entre les deux rives de la Méditerranée pour tenter de montrer une volonté, même timide, de corriger ses errements et ceux de sa classe politique corrompue et de ses outils de propagande stipendiés, il a préféré la prudence diplomatique. Celle qui ne dit rien pour ne fâcher personne.
Ce message creux reflète l’essoufflement d’une diplomatie française qui peine à trouver sa voix et son cap. Derrière la façade des mots polis, se cache le malaise bien réel d’un pouvoir français qui n’a plus ni l’audace de ses discours ni la cohérence de ses actes. En voulant saluer l’Algérie, Emmanuel Macron n’a réussi qu’à révéler le vide politique qui entoure désormais sa parole.
K. B.



