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Le roi et le chien Aboud

Par Karim B. – Le roi du Maroc est frustré. Il a tendu sa main au voisin, une main royale, poudrée, ornée d’anneaux, préparée pour la photo, mais le voisin de l’Est ne l’a pas serrée. Il a osé la laisser flotter dans le vide, comme une promesse qui ne vaut plus rien. Depuis, leur «majesté» fulmine : comment un simple mortel peut-il refuser le contact sacré de la peau royale ?

Blessé dans son orgueil, le roi a alors fait ce que font tous les rois quand ils ne savent plus penser. Il a aboyé par procuration. Il a lâché son chien, Hichem Aboud, un animal dressé à défendre l’honneur du trône avec plus de conviction que d’intelligence. Le molosse s’est mise à hurler, à montrer les crocs, à courir autour du palais comme s’il chassait l’ombre du mépris.

Mais cela ne suffit pas à Mohammed VI. Il veut du bruit, du spectacle, du loyalisme en technicolor. Il a donc convoqué ses bouffons aussi, Anouar Malek, Chawki Benzahra, Walid Kebir, ces champions de la contorsion verbale, ces danseurs de cour payés à applaudir le vide. Il leur a ordonné d’effectuer une danse du ventre, symbole grotesque d’une souplesse qu’ils ont depuis longtemps érigée en carrière. Leurs hanches se balancent, leurs voix crient : «Vive le roi ! Vive le roi !», comme si répéter le mensonge suffisait à le rendre vrai.

Et le roi, assis sur son trône vacillant, les regarde avec satisfaction, pendant que son peuple crie famine, ses terres s’assèchent. Mais lui se rassasie d’applaudissements et d’illusions. Il se persuade qu’il gouverne encore, alors qu’il ne fait que régner sur un décor. Le voisin, pendant ce temps, rie doucement et reprend sa vie, indifférent à l’opéra grotesque du royaume d’à côté.

Ainsi va le souverain frustré. Incapable de construire un pont, il préfère dresser des chiens. Incapable d’écouter, il fait danser ses fous. Et quand sa main tendue revient vide, il croit encore qu’il s’agit d’une victoire, parce que son caniche Hichem Aboud a jappé.

Dans ce royaume-là, le roi ne tend plus la main, il la brandit. Et si personne ne la saisit, tant pis, il s’applaudit lui-même.

K. M.

P.-S. : Que les chiens me pardonnent cette comparaison insultante.