Par Kamel M. – A la veille de la réunion du Conseil de sécurité consacrée à la Mission des Nations unies pour l’organisation d’un référendum au Sahara Occidental (Minurso), le représentant de la République sahraouie auprès de l’ONU et coordinateur avec la Minurso, Sidi Mohamed Omar, a adressé une lettre officielle à Vassili Nebenzia, représentant permanent de la Fédération de Russie et président en exercice du Conseil de sécurité.
Cette correspondance, transmise par la représentation sahraouie à New York, exprime la position du Front Polisario vis-à-vis du projet de résolution américain présenté le 22 octobre 2025. Dans sa lettre, Sidi Mohamed Omar manifeste la préoccupation des autorités sahraouies quant à l’orientation du texte préparé par les Etats-Unis, pays porteur de plume sur le dossier du Sahara Occidental au sein du Conseil.
Le diplomate sahraoui estime que le document américain «constitue une dérive grave et sans précédent, non seulement par rapport aux principes du droit international qui fondent la question du Sahara Occidental en tant que problème de décolonisation, mais aussi par rapport au cadre dans lequel le Conseil de sécurité traite habituellement cette question». «Le projet s’éloigne des fondements juridiques qui régissent le statut du territoire, considéré par les Nations unies comme une question de décolonisation non résolue», appuie-t-il.
Sidi Mohamed Omar rappelle que «le Conseil de sécurité a établi, de manière constante et par consensus, les bases de la solution et du processus y conduisant : des négociations sous les auspices du secrétaire général, sans conditions préalables et de bonne foi, afin de parvenir à une solution politique juste, durable et mutuellement acceptable, garantissant au peuple du Sahara Occidental l’exercice de son droit à l’autodétermination».
En se référant à la jurisprudence internationale, il ajoute que «comme l’a confirmé la Cour internationale de justice, la souveraineté sur le Sahara Occidental appartient exclusivement au peuple sahraoui, qui jouit d’un droit inaliénable, imprescriptible et non négociable à l’autodétermination, qu’il doit exercer librement et démocratiquement sous la supervision des Nations unies».
Pour le Front Polisario, «toute approche qui établit un cadre prédéterminé pour les négociations, en fixe à l’avance les résultats, limite l’exercice du droit du peuple sahraoui à l’autodétermination ou impose une solution contre sa volonté est inacceptable».
Le représentant sahraoui souligne que la République sahraouie demeure engagée dans la voie du dialogue : «Le Front Polisario reste attaché à la réalisation d’une paix juste et durable, pour laquelle il a consenti d’importantes concessions et sacrifices depuis le début du processus de paix dirigé par les Nations unies», insiste Sidi Mohamed Omar.
Il précise également qu’«à titre de geste de bonne volonté et en réponse aux résolutions du Conseil de sécurité, le Front Polisario a présenté au secrétaire général de l’ONU, le 20 octobre 2025, une proposition élargie, et demeure disposé à s’engager de manière constructive dans le processus de paix sur la base de l’esprit et du contenu de cette proposition».
La lettre adopte un ton plus ferme lorsqu’elle évoque les conséquences d’une éventuelle adoption du texte américain sans amendements : «Si le projet de résolution est adopté sans tenir compte des éléments mentionnés ci-dessus et sans les traiter de manière efficace, le Front Polisario ne participera à aucun processus politique ni à aucune négociation fondée sur le contenu du projet de résolution.»
Cette déclaration constitue un avertissement clair. Le Front Polisario refuse de cautionner une approche qui, selon lui, contredirait le principe du droit à l’autodétermination.
La lettre se conclut par un appel solennel aux membres du Conseil. «Le Front Polisario, note Sidi Mohamed Omar, a confiance que les membres du Conseil de sécurité resteront toujours fidèles aux buts et principes de la Charte des Nations unies ainsi qu’aux principes pertinents du droit international applicables au Sahara Occidental.»
Il les exhorte à «user de leur influence de manière constructive afin de créer les conditions nécessaires pour que les deux parties, le Front Polisario et le Maroc, s’engagent dans des négociations sérieuses, crédibles et limitées dans le temps, sans conditions préalables et de bonne foi, sous l’égide des Nations unies». Il conclut que «c’est la seule voie juste et saine qui puisse conduire à une paix véritable, juste et durable dans notre région».
La lettre du représentant sahraoui exprime à la fois une protestation diplomatique ferme contre le projet de résolution américain et une réaffirmation de l’attachement du Front Polisario à une solution politique conforme au droit international. Elle appelle le Conseil de sécurité à préserver l’intégrité du processus onusien et à garantir le droit inaliénable du peuple sahraoui à l’autodétermination, un principe que le représentant du peuple sahraoui considère comme la pierre angulaire de toute paix durable au Sahara Occidental.
K. M.



