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Le Sahara n’est pas Gaza

Par Abdelkader S. – Alors que les projecteurs du monde restent braqués sur Gaza, une autre crise enfouie menace de s’embraser à nouveau : celle du Sahara Occidental. Mais que l’on ne s’y trompe pas, le parallèle s’arrête là. Car le Sahara Occidental n’est ni une enclave assiégée ni une terre sans défense. Et le Front Polisario n’est pas le Hamas.

Le plan américain visant à imposer une autonomie sous souveraineté marocaine, en contrepartie de l’alignement honteux du Maroc sur l’Etat criminel d’Israël, rencontrera une résistance frontale du côté sahraoui. Instigué par l’imprévisible Trump et son gendre sioniste Jared Kushner, ce troc diplomatique – reconnaissance du Sahara Occidental occupé comme marocain contre normalisation avec Tel-Aviv – est perçu par les Sahraouis comme une violation flagrante de leur droit fondamental à l’autodétermination. Or, ce droit est inscrit noir sur blanc dans les résolutions des Nations unies.

Le Front Polisario dispose d’une structure militaire organisée, formée à la guerre conventionnelle. Le Maroc, lui, en a pleinement conscience. Et Rabat sait aussi qu’une implication israélienne directe dans ce conflit constituerait un tournant aux conséquences régionales dramatiques. Une telle intervention ne manquerait pas d’élargir le front à toute la région maghrébine et sahélienne, avec un risque d’embrasement généralisé. L’Europe, déjà fragilisée par les effets de la guerre en Ukraine et les tensions au Proche-Orient, n’a pas besoin d’un nouveau foyer de crise aux portes de la Méditerranée.

Sur le front diplomatique, les Etats-Unis, autrefois tout-puissants au Conseil de sécurité, se retrouvent plus isolés que jamais. Moscou et Pékin n’ont pas digéré l’usage répétitif du veto américain pour bloquer toute initiative contre le génocide à Gaza. Aussi la Russie et la Chine bloqueront-elles toute résolution contraire aux intérêts sahraouis.

Le Sahara Occidental redevient ainsi un point de cristallisation des fractures de l’ordre international. Entre ambitions néocoloniales, jeux d’influence et résistances populaires, un nouvel affrontement diplomatique, voire militaire se dessine. Mais une chose est certaine : le temps où l’on décidait de l’avenir des peuples sans eux est bel et bien révolu.

A. S.