Par Mohamed K. – La situation au Mali tourne à la catastrophe. L’avancée spectaculaire des groupes armés islamistes vers Bamako laisse craindre une chute imminente de la capitale. Ce qui semblait hier encore impensable, voir les drapeaux d’Al-Qaïda flotter aux portes du fleuve Niger, devient aujourd’hui une hypothèse sérieuse.
Les éléments armés du groupe terroriste Jama’at Nusrat Al-Islam Wal-Muslimin (JNIM), filiale d’Al-Qaïda au Sahel, ont mené ces dernières semaines une série d’opérations coordonnées dans le centre et le sud du pays. Leur stratégie consiste à asphyxier Bamako par un blocus économique et isoler le régime putschiste du colonel Assimi Goïta, déjà fragilisé par les divisions internes et l’effondrement logistique de son armée.
Sur le terrain, les signes d’un effondrement militaire se multiplient. Les garnisons de Kati, Koulikoro et Kita sont sous pression constante. Les voies d’approvisionnement en carburant et en vivres sont coupées depuis plusieurs semaines. Bamako vit désormais au rythme des pénuries et des rumeurs d’infiltration djihadiste, selon des sources concordantes.
Malgré les déclarations rassurantes du pouvoir, l’armée malienne ne semble plus en mesure de contenir la progression des groupes armés. «Le régime a perdu la main sur le pays réel», confie un diplomate sous couvert d’anonymat. «Ce n’est plus une question de résistance militaire, mais de survie politique», alerte-t-il.
Comment expliquer une telle montée en puissance de JNIM ? Les observateurs évoquent une combinaison de ressources locales et d’aides extérieures. Les groupes islamistes contrôlent désormais plusieurs zones minières artisanales et des routes commerciales de contrebande reliant le Mali à la Mauritanie et au Burkina Faso.
Mais au-delà de ces revenus, certains analystes soupçonnent des soutiens indirects venus de l’étranger, alimentant la logistique et l’armement des combattants. «Ces groupes bénéficient d’un réseau financier tentaculaire, opérant depuis la Libye et le Moyen-Orient», fait remarquer un expert sécuritaire. «Leur offensive actuelle n’est pas spontanée, elle est planifiée», indique-t-il.
Pour l’Algérie, la perspective d’un effondrement total de l’Etat malien est une menace stratégique majeure. La création d’une zone d’influence islamiste à Bamako, dirigée par une coalition affiliée à Al-Qaïda, rappellerait les sombres heures de la Syrie, où les manipulations géopolitiques ont fini par livrer le pays à un gouvernement issu du groupe armé d’Al-Nosra, soutenu par la France.
L’Algérie, fidèle à sa doctrine de non-ingérence mais consciente du danger, observe de très près l’évolution de la situation. Son expérience de la lutte antiterroriste dans les années 1990 et son rôle de médiateur historique dans la région font d’elle le seul acteur capable d’influencer le cours des événements, à condition que Bamako revienne à la raison.
Jusqu’ici, la junte malienne s’est enfermée dans une posture d’isolement, alimentée par des calculs politiques mal inspirés et des influences extérieures, notamment marocaines. Mais à mesure que la menace se précise, des voix s’élèvent à Bamako pour réclamer un rapprochement avec Alger, seul capable d’apporter un soutien logistique, diplomatique et sécuritaire crédible.
«Le Mali doit sortir de ses illusions et reconnaître que son salut passe par la coopération avec l’Algérie, pas par les slogans nationalistes», estime une source malienne.
L’heure est grave. Si Bamako tombe, c’est tout l’équilibre du Sahel qui vacillera. La menace ne s’arrêterait pas aux frontières maliennes, mais s’étendrait vers la Mauritanie, le Niger et le sud de l’Algérie où la priorité est claire : empêcher qu’un foyer islamiste durable ne s’installe à ses portes, appuyé par des puissances étrangères hostiles : les Emirats arabes unis, Israël et la France, principaux pourvoyeurs des groupes islamistes armés depuis des décennies.
M. K.



