Par Houari A. – Les récentes prises de parole du nouveau ministre français de l’Intérieur, Laurent Nunez, ont suscité un vif intérêt tant en France qu’en Algérie. Dans un contexte marqué par une crise diplomatique majeure entre Alger et Paris, l’ancien patron de la police a exprimé ses regrets concernant la rupture de la coopération sécuritaire entre les deux pays, joignant ainsi sa voix à celle de la directrice générale du contre-espionnage, Céline Berthon. Cette rupture, survenue depuis le déclenchement de la crise diplomatique, pèse lourdement sur les efforts conjoints de lutte antiterroriste, secteur dans lequel l’Algérie jouit d’une expertise reconnue.
Depuis plusieurs années, la collaboration entre les services de sécurité français – DST puis DGSI – et algériens s’était consolidée, notamment autour de la lutte contre le terrorisme. La maîtrise algérienne du dossier, fruit d’une longue expérience face aux groupes islamistes armés (GIA) sur son sol, constituait un pilier essentiel des échanges de renseignement. Mais avec le refroidissement des relations diplomatiques, ce partenariat s’est brutalement interrompu côté algérien, en guise de mesures de rétorsion induites par les provocations incessantes de Paris.
Laurent Nunez, homme de terrain et nouveau locataire de la place Beauvau, a reconnu explicitement ce vide. Dans ses déclarations, il ne cache pas ses inquiétudes face à la montée des menaces sécuritaires et laisse entendre que la France a tout à perdre dans cette rupture. Pour beaucoup, ses propos pourraient marquer un début de retour au dialogue, une volonté de dépasser les différends accumulés au fil des années entre Alger et Paris.
Mais ce possible retour à la table des négociations ne saurait se faire sans conditions. L’une des pierres d’achoppement majeure reste la question des cyber-traitres que l’autre bras des services français utilise pour mener des actions subversives depuis la France. La DGSE, le service de l’action extérieure, alimente cette main invisible, facteur de tension permanente entre les deux capitales, d’autant que son rôle dans l’introduction de l’islamisme puis du terrorisme en Algérie dans les années 1990 a été démontré par les faits.
Le gouvernement français, confronté à cette réalité, devra trancher : livrer ces individus à la justice algérienne, ou voir les efforts de réconciliation condamnés d’avance. Les autorités algériennes ont d’ores et déjà affiché leur fermeté, insistant sur le fait qu’aucune concession ne sera accordée sans ce geste important.
Emmanuel Macron et Laurent Nunez semblent pour l’instant afficher une volonté de dialogue. Toutefois, d’aucuns estiment que cette main tendue pourrait n’être qu’une façade politique, une manœuvre, encore une, destinée à réparer une grave faute stratégique. Le remplacement de Bruno Retailleau, cacique égocentrique, par Laurent Nunez, un ministre plus pragmatique et proche du terrain, peut être perçu comme un signe d’ouverture réelle.
Reste à voir si cette nouvelle dynamique permettra réellement d’aplanir les différends historiques qui pèsent sur les relations algéro-françaises, ou si les tensions profondes continueront de miner toute tentative de réconciliation par une nouvelle démarche hypocrite du régime néo-monarchique de Paris.
H. A.



